L’œil du Soleil

L’œil du Soleil

— Soleil ! Pourquoi te lèves-tu si tard ?
Et pourquoi as-tu l’œil si rouge ?
As-tu fait cette nuit un cauchemar,
qui t’a fait pleurer dans ton sommeil ?
— Ni sommeil ni rêve ni bon ni mauvais.
J’ai veillé toute la nuit…
Tandis que l’occident frivole dormait sur les cendres
grises de ses lauriers j’ai fait le tour de la Terre.
Et j’ai vu des gens mourir de faim.
J’ai vu des gens mourir de froid.
J’ai vu des gens mourir de désespoir.
J’ai vu des gens s’entretuer, des frères s’étrangler.
J’ai vu des peuples opprimés.
J’ai vu un grand dirigeant tomber
sous la balle d’un dément.
J’en ai vu beaucoup qui pleuraient :
Et j’ai continué, indifférent…
J’en ai vu cependant qui se moquaient des gens dans la peine,
des gens dans la misère
Des gens sous le joug.
C’est alors que j’ai pleuré,
C’est pourquoi mon œil est rouge.


— Soleil ! sèche tout de suite tes larmes !
La mer de Bretagne adoucira bientôt
Ton œil rouge et enflammé… ANJELA DUVAL


A mon étoile disparue..

« La terre me parle, je lui réponds. J’écris pour elle, je voudrais pouvoir transmettre le message de la terre « Anjela Duval

A mon étoile disparue

Sur l’appui de la fenêtre du vieux logis
Trois faux, une pierre à aiguiser
Un marteau, une enclume.
Par-dessus — l’un sur l’autre
Deux petits sabots de bois jaune
Aux brides de cuir noir.
Ils avaient ramassé de la boue là-bas
Dans les ruines du Chemin des Améthystes
Petits sabots de bois jaune !
Petits souliers de mon étoile !
Et ses chaussons bleu nuit
Sur lesquels l’araignée a tramé
Son filet aérien et solaire !
— Quand le retrouvera-t-elle
Mon étoile, son pied agile ?
… Mon étoile est malade
Mes jours sont noirs, noires mes nuits !
… Vous regardez par la fenêtre du vieux logis
Petits sabots de bois jaune
Notre étoile reviendra-t-elle ?

21 novembre 1970

Anjela Duval (Traduction Paol Keineg)



Anjela Duval

Papillon et Abeille

—S’’il fait beau
Dit le papillon volage
S’’il fait beau
Je battrai bientôt la campagne.
—Et moi, dit l’’abeille
Au papillon écervelé
Je me mettrai au travail
S’’il fait beau.

Juin 1967

(Traduction Paol Keineg)

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photo: Eveline56


Une petite fleur d’ajonc parlait

— Tu étais pressée de me cueillir, hein ?

Et tu t’es piquée le doigt à mes épines !

Un petit peu de rouge a coulé

Sur mon habit doré

Et tu t’es dit : voilà qui est bien !

Et tu m’as enfermée dans ta lettre…

Si tu avais fait un petit trou dans l’enveloppe

J’aurais pu voir pendant le voyage.

Les royaumes celtiques d’outre-mer

Et j’aurais salué

Le chardon d’Écosse

Avec ses bruyères roses

Le trèfle d’Irlande et mes sœurs jaunes

M’auraient répondu à coups de parfum

Que j’aurais emporté là-bas

Chez les Celtes en Exil

Au bout du Monde :

— En toi se mêlent tous les parfums de la Celtie

Ton cœur de miel doux dans l’âpreté des épines.

Anjela Duval

lien pour:

Anjela Duval….

30 janvier 1971

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Jean-Yves Couliou
(1916-1994)
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Poèmes de nuit, poèmes de jour ….Barzhonegoù noz, Barzhonegoù deiz

Poèmes de nuit, poèmes de jour

Si j’écris à l’ombre de ma lampe
Des vers maladroits et creux
Avec ce petit outil mal assuré dans ma main lasse
Si j’écris le soir au dos d’enveloppes
Des poèmes humbles : camelote
Où l’on ne trouve que des fleurs sauvages…
Et quelques miettes d’amour.
Car tout cela je le fais pour ceux que j’aime.

Mais j’écris, moi, d’autres poèmes
Et ce n’est pas à l’ombre de ma lampe
Mais à la lumière du soleil
Ce n’est pas au dos d’enveloppes
Mais sur la poitrine nue de Celui que j’aime
Sur la peau nue du Pays que j’aime
Ce n’est pas avec un outil que j’écris
Mais avec des instruments d’acier.
Je ne parle pas de lance ou d’épée
Mes instruments sont de paix et de culture.

Je n’écris pas des vers de douze pieds
En comptant sur mes doigts
Mais de douze fois douze enjambées… et plus.
Mes vers, je les écris avec l’acier tranchant de ma faux
Andain après andain dans les cheveux blonds de mon Pays
Le soleil en fait des poèmes aromatiques
Que mes vaches ruminent pendant les nuits d’hiver

Mes vers je les écris avec le soc de la charrue
Dans la chair vivante de ma Bretagne, sillon après sillon
— J’y dissimule des graines d’or —
Le Printemps en fera des poèmes :
Mers d’émeraude ondulant dans la brise
L’été en fera des étangs d’épis
Le vent d’août les mettra en musique
Et le chœur de la batteuse me chantera
Les journées ardentes du huitième mois
Les journées de peine de poussière de sueur.
Mes Poèmes sacrés et… méprisés !

ANJELA DUVAL, Janvier1966

(Traduit du breton par Paol Keineg)

 

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Promenade au bord de la mer si belle…. Le soir tombe et je pense à ce poème d’Anjela qui parle d’amour et de paix : « Mes instruments sont de paix et de culture ».

Poèmes de nuit, poèmes de jour…. Barzhonegoù noz, Barzhonegoù deiz

cropped-eve.jpg           a-greiz kalon… Du fond du cœur… Eveline56

 

 

 

Joyeux printemps ! nevez amzer

Le grand cavalier au veston vert, court le monde.

Il habille la lande, les bois et les pâturages d’or et d’argent.

Il sème le long des talus, le long des chemins, des diamants, des perles, des étoiles et des clochettes.

le printemps est arrivé (…)  Anjela duval

 

 

Joyeux printemps !  Eveline56rené-magritte-le-printemps

Rene MAGRITTE – Le Printemps

 

 » Image à la une:  étang de nymphéas par le peintre Claude Monet »

Claude Monet commence la réalisation de cette toile aux prémices de la 1ère Guerre Mondiale et a la volonté de créer un décor de paix et de quiétude dans un monde à l’aube d’une guerre qui touchera l’Europe et le monde.